À propos du film
"Ils parlent face caméra. Ils ont cet air un peu tendu du suspect ou de l’analysant. Nul flic ni psy pourtant en face deux, juste l’écrivain et plasticienne Valérie Mréjen, discrète mais qui sait ce qu’elle veut. Elle recueille les témoignages d’Israéliens qui ont rompu avec la religion ultra-orthodoxe et ses multiples interdits (notamment alimentaires). Rupture violente qui implique un saut vers ce grand inconnu qu’est le monde laïc. Comment plonge-t-on dans le fanatisme religieux, en Israël ou ailleurs ? La question est souvent débattue. La mutine Valérie Mréjen, qui ne fait rien comme tout le monde, a pris, elle, le problème à l’envers : comment certains en sortent. Autant positiver… Un jeune homme devenu chef cuisinier dit comment il s’est enfui de chez ses parents à 15 ans, un autre pourquoi ses enfants ne veulent plus le voir. Pas de parcours édifiants et complets, plutôt des récits lacunaires d’où surgissent des détails. Une femme décrit la caresse nouvelle du vent sur ses cheveux, un autre évoque son sex-appeal en rollers. Il y a les blasphèmes regarder un arc-en-ciel et les tabous levés la trouille au ventre. C’est parfois terrible, mais en creux. Imperceptible, la peur plane toujours, celle d’un châtiment, d’une punition. Douleur compliquée que celle de ces exilés hagards, rescapés courageux frappés d’infamie. Aucun, du reste, ne semble totalement libéré, et Valérie Mréjen s’attache presque autant à ce qui est tu qu’à ce qui est dit. On savait son goût pour les dessous mystérieux de la langue, on le retrouve dans ce documentaire réservé, sorte d’antidote précieux au déferlement d’aveux spectaculaires." Critique de Jacques Morice, Télérama
"Valérie Mréjen est toute écoute, ne commente pas, fuit le didactique. Elle a un œil, le goût du plan fixe, bien cadré, de la belle lumière. Elle sait laisser s’installer le silence, et la souffrance. Au fil de Pork and Milk\n se diffuse une tristesse. Ses interlocuteurs passent insensiblement du bonheur d’avoir osé transgresser les prescriptions religieuses et combattu l’obscurantisme à la mélancolie. S’être affranchi d’un carcan a un prix : le sacrifice de la famille, la culpabilité d’avoir blessé les parents, une perte de repères, le sentiment difficile à évacuer d’être "une menace spirituelle". \nLa découverte, aussi, que le monde laïque a ses écueils. Regards dans le vague, songeurs, émotion contenue." Critique de Jean-Luc Douin, à retrouver sur www.lemonde.fr