À propos du film
Moi non ou l’argent de Patricia (1981) dessine certaines lignes de force de la filmographie de Claire Simon. On songe notamment à cette idée d’une mise en scène en direct, intuitive et réactive – la cinéaste ne passant pas par une phase d’écriture pour ses premiers films. Aussi, le fait que le réel fait au moins autant l’expérience du film que le contraire, et que, surtout, ces entités sont inséparables. Il advient aussi que l’énonciation de Claire Simon semble très vite en place, une voix – reconnaissable entre toutes – venue de derrière une caméra qui éprouve autant qu’elle éprouve le corps d’une filmeuse en action, en mouvement, à la fois très concentrée sur son outil et totalement disponible à ce(ux) qui l’environne(nt).
Aussi, ce premier film est-il marqué « historiquement », particulièrement par les derniers feux de la période militante du cinéma – qui culmine dans les années 1970. Moi non ou l’argent de Patricia est d’abord résolument féministe, questionnant notamment le rapport entre corps et argent. La réflexivité du « film en train de se faire » tourne à plein régime, le générique est tapé « en direct » à la machine par le personnage du film, elle-même secrétaire aux Ateliers Varan et amie d’enfance de Claire Simon. Perpétuellement interrogé, le film se définit comme un espace partagé qui se discute, se négocie. Patricia est Patricia, tout en faisant parfois le son. L’acte de déconstruction atteint ainsi toutes les composantes du métrage, aussi bien devant - qu’est-ce qu’être filmé ? – que derrière la caméra – qu’est-ce que filmer ? " Arnaud Hée www.critikat.com/dvd-livres/dvd/du-super-8-a-la-video-les-premiers.html (mai 2011)